La laïcité de l'Etat camerounais devient au fil des décennies un fait de risée, vus les multiples frasques de certaines communautés chrétiennes dites "de réveil". Ces inconduites qui marquent un excès de liberté mettent en place un champ de confusions visiblement mal contrôlé par l'appareil gouvernemental. Alors que les activités d'associations sont régies par des textes clairs, les églises de réveil font et imposent leurs politiques à la société sous le nez de tous et souvent par des actions pernicieuses et répréhensibles.

Scène d'adoration dans une chapelle d'église de réveil

La liberté de culte au Cameroun : un bénéfice pour tous

L'Africain est un être essentiellement croyant, ce qui justifie à forte raison l'activité en masse des populations camerounaises au sein des mouvements religieux. Au Cameroun, pays de fortes diversités socioculturelles, que l'on soit chrétien, musulman ou athée, la loi ordonne le respect pur et simple des individus ou groupes envers le culte d'autrui. Nul n'est censé offenser son prochain sur la base de sa vie spirituelle ou sur la base de son appartenance cultuelle. La loi du 19 décembre 1990 complétée par celle du 20 juillet 1999 régit la liberté des associations en leur conférant un statut légal dans la république.
C'est grâce à ces dispositions qu'on assiste au pullulement sans obstacle des églises de réveil, très communément désignées sous l’appellation "églises réveillées", sans doute à cause du bruit très fort causé par leurs modes d'adoration ou de louange.

Création facile et fonctionnement anticonformiste

Ouvrir une église de réveil au Cameroun est une entreprise très facile. Les motivations vont de la proclamation de l'évangile au simple appât du gain. Oui, au Cameroun, il existe des communautés de réveil aux motivations nobles, celle qui prêchent la parole en recherchant sur la base biblique, le bien-être et le salut de membres. D'autres à l'opposée sont créés par des individus en quête d'emploi ou de femmes et qui se transforment en pasteurs. On les surnommes les "bonbons pasteurs". La gestion des dîmes, dons et offrandes va concourir à leur enrichissement au détriment des fidèles à qui ils promettent sans cesse la prospérité, le travail ou encore le mariage et un voyage en Europe. 


Des pasteurs parmi ces centaines de gourous promettent guérison, délivrance et réussite et font des prières moyennant des sommes d'argent qui varient selon les portefeuilles. Des cultes spectaculaires et bruyants ornent les dimanches et certaines soirées en semaine, saisissant la curiosité ou provoquant le courroux des voisins et des passants.

Purification des âmes et des... Cerveaux ?

L'idée d'un lavage des cerveaux de certains membres qui appellent affectueusement leur maître "Papa", "Prophète" ou "Apôtre" par ces derniers ne date pas de de nos jours. On peut ainsi voir des gens prêts à accomplir des actions inouïes qui ne leur étaient pas propre avant leur "nouvelle naissance", comme le dépôt régulier de leur salaire intégral aux pieds de la chaire ou la vente de biens pour la cause de l'église. Tous ces faits non conformes à la morale ont pour conséquences la division des familles, l'abandon du travail par certains, la paupérisation des populations inertes qui ne jurent que par la grâce divine, et la rébellion contre l'Etat.

Des églises contre la volonté de l'Etat, mais à perte

La liberté de religion ou de culte n'induit pas le libertinage contre les lois de la république, mais certains leaders religieux des communautés de réveil au Cameroun se sont déjà distingués par des délits graves. Plusieurs rumeurs de détournements de fonds circulent, touchant les plus célèbres pasteurs de réveil. On peut citer d'une part le très célèbre Dieunedort Kamdem alias "Général de Dieu", sujet d'énormes accusations d'escroquerie. Seule solution trouvée : l'exil financier au Canada où il a vite fait de réimplanter sa doctrine, malgré la réputation qui le suivait. On peut dire qu'il échappe très bien au barreau du Cameroun.


D'autre part, nous avons le pasteur Martin Tsala Essomba du "Ministère va et raconte" souvent accusé, lui aussi, d'escroquerie et de manipulation. Installé au Cameroun, il pratique du commerce en plein culte, comme le démontre cet article de rjcpatriote, en appliquant des tarifs exorbitants sur des produits tout à fait banals. Entre autres : 
  • Une bouteille d'eau bénie à 2.500 Fcfa
  • Un mouchoir de protection à 500 Fcfa
  • Une audience avec lui à 10.000 Fcfa
  • Une séance de délivrance à 50.000 Fcfa
Ceci n'est pas exceptionnel, car à part ces deux exemples, plusieurs autres le font, à en croire de nombreux témoignages déjà reçus à travers les médias. Ces pasteurs ne reversent pas l'impôt de ces ventes aux services du Ministère des Finances et là où le bas blesse, malheureusement, c'est que les principales proies ou victimes sont les adeptes de ces groupes. Plusieurs disciples de ces très particuliers "hommes de Dieu" perdent la notion du sens commun. Voilà comment des citoyens jadis "normaux" deviennent hostiles au respect des effigies nationales (drapeau et hymne national), à certains soins de santé spécifiques comme la transfusion sanguine ou plus récemment, au port obligatoire du masque dans le cadre de la lutte contre la pandémie de Covid-19 au Cameroun.

Juillet-Août 2020 : l'opposition à l'Etat prend une forme inquiétante

Ces derniers jours, des événements du même ordre se sont répétés au Cameroun et ont nourri les médias. En effet, des candidats aux différents examens officiels de fin d'année organisés par le Ministère des enseignements secondaires ont refusé de porter un "masque anti-Covid-19" pour entrer en salle d'examen. Selon leurs explications sur procès verbaux signés, leur religion le leur interdit, car appartenant à Jésus-Christ, selon leurs différents pasteurs, il n'est pas question pour eux de porter ces masques, signes d'appartenance inconditionnelle au Nouvel ordre mondial. Le renoncement à se plier aux dispositions adoptées par l'Etat camerounais a amené ces candidats à rebrousser chemin, volontairement, tournant ainsi le dos aux examens et futurs diplômes (un cas au Lycée de Tsinga pour le baccalauréat et d'autres cas au Lycée de Biyemassi pour le BEPC).

Un pasteur nommé Ngoa Atangana, de l'église "Tabernacle de la liberté" et considéré comme l'un des responsables du refus de ces candidats de porter le masque en salle d'examen officiel,est aux arrêts. De plus, il est reconnu coupable de défier l'autorité du gouverneur de la région du Centre en tenant des cultes secrets au sein de sa chapelle alors qu'elle avait été scellée. Ses enseignements qui dressent ses fidèles contre l'autorité étatique ont été qualifiés d'endoctrinement pernicieux par Serge Biwele, Sous-préfet de Yaoundé 3.

Une orientation perverse à maîtriser au plus vite

La Bible apprend au chrétien à rester soumis aux autorités dont le pouvoir vient de Dieu. Mais si de nos jours, des pasteurs prêchent plutôt la rébellion en donnant des instructions spirituelles qui violent l'ordre public, on peut sans hésiter affirmer que la religion longtemps laissée libre par des prescriptions légales, n'est pas loin de devenir une source pérenne de maux difficiles à éradiquer. Les églises sont considérées comme des lieux où règnent des messages de paix, d'amour et de partage, et l'Etat gagnerait à s'opposer d'une main d'acier aux différentes tentatives, aussi bénignes soient-elles d'insoumission.

Nous ne souhaitons cependant pas en arriver à des répressions musclées qui donnent accès à la violence généralisée. L'intégrité des personnes est préservée par les institutions, mais ces institutions ont besoin de l'accompagnement des citoyens par leur désir constant de vivre dans une société stable et harmonieuse. A chacun de prendre ses dispositions pour que le Cameroun ne souffre pas de ses églises de réveil ou d'autres groupes chrétiens et musulmans, car on recense des casseroles de toutes parts. Aucune religion ne peut juger une autre, mais le respect des lois dans l'intérêt de tous ne devrait pas être, de prime abord, négociable.


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